épisode 9
Mathilde était une fille sympa, on la croisait souvent Daniel et moi, lorsqu'on allait faire du sport à la salle de gym de la fac. Je n'avais jamais été trop attiré par ce genre d'endroit, grouillant de mecs suintants, chargés à bloc de testostérone plus ou moins naturelle. En fait, l'odeur des vestiaire me foutait la gerbe depuis la tendre enfance, depuis le jour où... Mais je m'égare ! On est pas là pour parler de moi après tout...
Nathalie, visiblement engrainée par ses copines, trouvait sa vie de plus en plus calquée sur celle des Bidochons. Elle avait terriblement peur de se réveiller un jour à trente ans, grosse, RMIste et devant torcher le cul de gamins et surtout mariée à un rondouillard qui passerait sa vie, les pieds en charentaises, posés sur la table basse face à un match de foot. Il falait qu'elle agisse et vite.
Voyant que l'amour de sa vie se coiffait de plus en plus mal, ne faisait plus d'effort pour la surprendre et qui plus est commençait à se sculpter un corps d'adulte mâle en commençant par le ventre et les poignées d'amour; Nathalie prit les choses en main. Elle arriva un jour chez elle, bien décider à faire sa loi. Très rapidement les choses avaient dégénérées : l'appartement était passé de « chez Daniel » à « chez Nous », puis très vite, il fallu déménager, parce que ça n'était vraiment pas assez épanouissant, ce studio de mec célibataire. Ainsi elle avait court-circuité Daniel pour envoyer le préavis de la chambre d'étudiant, et elle leur avait trouvé un nid d'amour parfaitement adapté aux envies et besoin de chacun.
Tout ayant un prix, il fallut qu'elle se trouve un job, vu que Daniel, préférait se consacrer à ses études (et à son ordinateur le reste du temps). Ainsi Nathalie était devenue la cheffe de famille, la working girl qu'elle rêvait d'être et cumula bientôt deux boulots qui n'avaient plus rien d'estudiantins.Les choses en étaient là, lorsqu'elle s'aperçut que son avenir commençait à lui échapper.
Un jour, Mel arriva, toute transpirante, d'une séance de fitness, au club de sa mère. Elle était rouge pivoine, ce qui n'était pas vraiment assorti avec les résidus de son maquillage. En vantant les mérites du training, du stretching, du harrassing, et surtout des mecs ruisselants de sueurs, toujours prêts à la draguer, Mélanie fit naître en Nathalie un nouveau désir : elle devait avoir un mec body-buildé, duquel elle n'aurait plus jamais honte, un mec avec des bras forts pour la protéger, un mec rien qu'à elle et qui ferait crever de jalousie toutes ses copines. Ainsi commença la tentative pour transformer Daniel en vrai mec.
Moi, comme je n'avais rien d'autre à faire à ce moment particulier de ma vie, je m'engagea à le soutenir moralement, puisque, comme nous l'avait annoncé Nathalie lors d'un briefing, « y aller à deux ça marche mieux !!, et puis franchement, vous en avez tous les deux bien besoin...! ».
Très vite on s'aperçut que les salles de gym recelait d'une population des plus bigarrée, mais généralement les filles y était plutôt... « félines ». Du coup on faisait vaguement travailler nos muscles, surtout ceux du système oculaire, tant il y avait de quoi regarder partout.
Nathalie ne participait que rarement à ce genre de séance sportive, tout occupée à enchaîner les heures de travail pour pouvoir assumer son ménage. Ce qui ne la dispensait pas de venir faire de petites inspections surprises, histoire de vérifier que Daniel transpirait bien , sans trop regarder les filles alentours. Le fait qu'elle nous laissa nous entrainer dans un tel lieu de tentation, nous étonna dans un premier temps. Puis on apprit bien vite que : premièrement, Nathalie estimait « qu'il n'y avait que des thons dans cette salle et que si on reluquait les machins qui s'y trouvaient, c'est qu'on était vraiment graves » et deuxièmement, une de ses copines s'y rendait elle aussi régulièrement. Nathalie nous garantit que ça ne servait à rien de chercher à apprendre qui était cette mystérieuse connaissance, mais nous devions être certains d'une chose, c'ets que celle-ci nous aurait bien à l'oeil, et qu'on ne pourrait donc se permettre aucun écart. Personnellement je trouvais que la façon dont Nathalie essayait de régenter ma vie était de plus en plus malsaine, après tout, je n'avais pas é sacrifier ma liberté pour le bien être de son couple. Elle m'avait cependant bien comprendre que j'avais intérêt à me tenir à carreau, que si je me mettais à draguer à tout va, Daniel prendrait très certainement exemple sur moi. Elle m'avait également avoué d'une part qu'elle me tolérait, parce que je n'avais pas de copine (donc pas de tentatrice à mettre sous les yeux de Daniel), et d'autre part, qu'avec ma « tronche de cake », je ne risquait pas d'en ramener de si tôt...
Quoi qu'il en fut, Mathilde était une charmante personne que nous voyions de temps à autre en ce lieu de perdition qu'était devenu ce gymnase universitaire. Elle était à peine plus âgée que nous, vivait avec son copain qui travaillait comme agent immobilier, et aimait se balader avec sa petite chienne Leslie.
Or, il s'avéra, que Mathilde résidait dans l'immeuble où Nathalie et Daniel venaient d'emménager. Étonnée de croiser un jour Daniel dans l'escalier, elle resta un instant bavarder avec lui.
«Ah salut ....
- Daniel.
- Oui voilà ! Daniel ! Je te confonds toujours avec ton copain, le gars en survêtement bleu.
- Ah lui ...
- Qu'est-ce que tu fais là, dis moi ?
- Ben, je rentre de faire les courses. J'habite ici en fait.
- Ah ouai ? C'est marrant, moi aussi. On est au troisième étage. Et toi ?
- Ben, moi euh... Daniel hésitait, il avait les mains moites car il se sentait épié, Nathalie n'allait pas tarder à arriver elle aussi, avec le reste des sacs de commissions. Au huitième. Ca fait pas longtemps.
- Ah c'ets cool ! Faudra passer nous voir dans ce cas. Et si tu as besoin de quelque chose, hésite pas. Mathilde, s'éccarta en souriant pour laisser passer une jeune fille, cachée derrière une montagne de cabas.
- Ah ... euh... oui ...
- Bon ! Daniel ! Tu m'aides ou quoi ? Au lieu de draguer cette blondasse moche ... Tu crois que je vais monter tout ça seule ? Rends-toi utile un peu...
- Ahaha... Bon, ben... à plus tard alors.
- Oui »
Le joli visage de Mathilde resta souriant, alors qu'elle essayait de voir ce qui se tramait au fonds du hall, près de la cage d'ascenseur. Quand la porte s'ouvrit, Daniel s'y engouffra avec la fille aux paquets.
« Alors ? T'as déjà trouvé une voisine à draguer ? Je te préviens, on est pas venu habiter ici pour que tu fasses ton chacal avec la première blondasse qui passe. Je te préviens, je supporterai pas si tu te mets à me faire des coups de putes dans le dos !!
- Quoi ? Mais de quoi tu parles enfin ?
- Tu crois que je t'ai pas vu ? Avec l'autre connasse en bas ?
- Hein ?!! Mais n'importe quoi ! C'est Mathilde, elle est...
- Ohhh Mon Dieu !! « Mathilde » !! t'as pas pu trouver plus paysan comme prénom ? Je savais que t'aimais les grosse vache, mais de là à essayer de te taper une fermière ...
- Pffff... Je la connais, elle fait du sport avec nous à la salle de gym !
- Ah ouai ?! Tu la connais depuis combien de temps ? C'ets pour ça que t'as voulu qu'on vienne habiter ici alors ?
- Mais c'ets toi qui a choisi cet immeuble, sans même me demander mon avis.
- Ouai c'ets ça ! Joue pas au plus malin avec moi. Je te connais. En tout cas, t'as bouseuse là, j'ai pas intérêt à la croiser dans les couloirs sinon je lui mets la misère.
- Mais pourquoi ? Qu'est-ce qu'elle t'as fait ? Elle m'a juste dit bonjour.
- Qu'est-ce qu'elle m'a fait ? Elle m'a fait qu'elle drague mon mec devant mon nez, dans mon couloir, dans mon immeuble.
- Mais arrête un peu !! Qu'il est lent cet ascenseur...
- Change pas de sujet !
- Elle a un mec, elle vit avec lui.
- Ben dis donc ! Tu connais tout sur elle on dirait. Elle porte des strings ou des culottes ? Elle va où en vacances ?
- Mais j'en sais rien !
- Pfff... je croyais que tu la connaissais !!
- Ouai enfin, je la connais vite fait comme ça. En passant.
- Ouai ouai ! C'ets ça, tu veux pas lui mettre un coup vite fait en passant non plus tant que t'y es ?!
- Tu dis n'importe quoi !! Je t'ai dit qu'elle a un mec. Ils vivent ensemble. - T'as qu'à aller les voir. Elle m'a inviter à passer chez eux...
- Ouai c'ets ça ! Je vais pas chez les grognasses qui sentent la bouse de vache ! En plus, elle sait même pas que t'as une copine.
- Oh ben je crois que maintenant elle a compris...
- Ah ouai ? Pourquoi tu me l'as pas présenté alors ? Quand on était en bas ? Pourquoi elle m'a pas dit bonjour ?
- Tu t'es même pas arrêtée ! T'as filé jusqu'à l'ascenceur et tu t'es mise à l'insulter.
- Moi j'ai insulté personne ! Putain mais qu'il est long cet ascenceur !! »
Mathilde était une chic fille. Elle nous avoua au bout de quelques semaines qu'elle ne savait pas trop comment réagir lorsqu'elle croisait Nathalie dans les parties commues. Elle avait peur d'elle et ne préférait pas trop l'approcher. Alors que nous discutions elle nous tendit une étiquette rose, trouvée sur sa porte d'entrée, un soir alors qu'elle rentrait chez elle.
Elle nous indiqua avoir tenter de monter chez Daniel, un jour, peu avant Noël, dans l'espoir de l'y trouver. Elle n'avait pas les clefs de son appartement et attendait que son concubin rentre les lui donner. En attendant elle avait une quinzaine de cadeaux de Noël à ranger, et elle devait impérativement partir chez sa mère. Alors que la confusion et l'énervement la gagnait, elle se rappella de son sympathique voisin, qui pourrait l'aider. Hélas, Daniel n'était pas là ce jour-là, et ce fut Nathalie qui lui ouvrit la porte. Celle-ci feignit dans un premier temps de ne pas la reconnaître, puis lui lança un regard noir. Avant même que la pauvre Mathilde n'eut le temps de lui expliquer sa situation ambarrassante, Nathalie lui avait claqué la porte au nez.
Sur le papier on pouvait lire :
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| Mon appartement n'est pas un garde meuble ! Chacun ses problèmes... La prochaine fois que tu adresses la parole à mon mec, je te crève les yeux et je raille ta voiture |
Quelques jours plus tard, Mathilde et son mec quittaient la résidence sous les yeux victorieux d'une Nathalie, à qui, décidément, tout réussissait.